En 1983, Monsieur Assane DIOP, ancien ministre de la République du Sénégal disait « qu’on ne peut éviter l’irrésistible appel de la ville avec ses immeubles, son asphalte, ses lumières, ses distractions, ses automobiles, son luxe apparent, véritable mirage collectif pour les adolescents ».
En 2017, cette prédiction a fini de démontrer sa véracité. Un flux de populations, en majorité jeunes, a eu entre autres conséquences, l’émergence de quartiers périphériques autour de la grande métropole Dakar. Ce phénomène s’observe également au niveau de toutes les grandes villes du pays, voire de la sous-région.
Cependant cet accroissement de la population jeune ne s’est pas accompagné de production de richesses capables de répondre à l’afflux massif de demandeurs d’emploi. Ce déséquilibre a contribué à la paupérisation des populations de ces quartiers.
Par ailleurs, l’inadéquation entre l’offre scolaire et la demande sociale de développement est venue aggraver cette situation, engendrant ainsi des comportements déviants touchant une frange importante des jeunes, voire d’enfants, avec l’utilisation abusive de produits stupéfiants, l’abandon scolaire, les violences, la colère, le rejet de l’autorité, la promotion d’antivaleurs, le vagabondage sexuel, les agressions contre les biens
et les personnes, l’émigration clandestine dans sa forme la plus radicale « Barca ou Barzak », c’est-à-dire Barça ou la mort etc.
Cette situation pose la problématique de la place et du rôle des jeunes dans leurs communautés et localités respectives où interviennent plusieurs institutions et organisations, à la recherche de solutions durables
Le Centre d’Entraînement aux Méthodes d’Education Active au Sénégal (CMEA Sénégal), une organisation membre de Comité National de Développement des Réseaux de l’Education en Afrique de l’Ouest-Sénégal (CNDREAO), n’est pas en reste, tant au niveau de l’action que de la réflexion. En 2015, la composante « Jeunes » de CEMEA Sénégal a été invitée à une rencontre à Dunkerque regroupant plus de cent jeunes venus de 8 pays. Cette rencontre mise en place par un réseau de recherche, a permis de dégager quatre axes de réflexion : « Prendre sa place ; les lieux avec et pour les jeunes ; la levée des stigmatisations ; leaders et exercice des responsabilités et des solidarités ». C’est à ce dernier axe qu’ont pris part les jeunes de CEMEA Sénégal en compagnie des Ukrainiens et des Français pour analyser leurs expériences à partir de films réalisés à cette fin, rendant ainsi compte de leur rôle d’acteurs actifs dans les activités de leurs milieux de vie.
Ensuite, du 29 mai au 02 juin 2017, le réseau de recherche-intervention a co-organisé avec l’Institut National Supérieur de l’Education Populaire et du Sport (INSEPS) et CEMEA Sénégal un séminaire, afin de poursuivre les échanges avec les jeunes de CEMEA Sénégal, des enseignants-chercheurs et des étudiants de ladite l’institution, sous la houlette de deux chercheurs émérites, Joëlle BORDET et Bernard HECKEL
Cette rencontre avait pour but de nourrir les réflexions engagées et rapportées au contexte sénégalais sur le thème : « De la colère à la démocratie : rôle des leaders des jeunes dans un contexte de solidarité collective ».
A cette occasion, la Coordonnatrice de CNDREAO Sénégal, Aby SANE a présenté une communication sur les actions menées par le Groupe Thématique Education non Formelle avec les jeunes et pour les jeunes, avant de terminer par un témoignage sur son parcours personnel, mettant en exergue la levée des obstacles pour en arriver là elle est aujourd’hui.
Dans le cadre de cette activité de haute portée scientifique et sociale, CEMEA Sénégal, conscient du fait que les jeunes ont besoin d’un espace spécifique de réflexion et d’expression, a mis en place la Journée internationale consacrée au thème : « Leadership, responsabilité, solidarité et les jeunes des quartiers populaires ». Une des participantes nous a alors confié : « je pourrais dire que la journée des jeunes CEMEA a été une belle expérience par rapport à l’organisation du séminaire étant donné que je n’ai jamais eu pareille occasion et dorénavant j’y ai acquis quelques compétences qui pourront m’aider dans l’avenir. J’ai notamment eu à prendre conscience de la jeune fille leader qui dormait en moi » ((Gnagna Sadiya DIENE).
Face à cette problématique, apporter des solutions durables aux problèmes cuisants de cette jeunesse devient dès lors une priorité des autorités certes, mais aussi des familles, des communautés et des organisations de la société civile.
Pour y parvenir, les résultats de la recherche et les conclusions issues de la journée des jeunes mettent en évidence aujourd’hui la nécessité de la participation active des jeunes à la vie démocratique, l’insertion des jeunes dans les processus de développement, la valorisation et l’accompagnement des associations d’éducation populaire, notamment dans leurs actions d’éducation citoyenne et environnementale, l’adaptation du système éducatif aux besoins réels de développement, la mise en place d’espaces de réflexion et de réalisation pour les jeunes et par les jeunes, la moralisation de la vie publique, le développement de stratégies innovantes de formation qualifiante appropriée, articulées à une politique cohérente et réaliste de création d’emplois et d’insertion.
La réalisation de telles ambitions nécessite la mobilisation et la mise en synergie de tous les acteurs et partenaires, notamment les jeunes autour de cette problématique.
La communication du CNDREAO